jeudi 11 juin 2009

La navigation sur Internet peut-elle être régulée par la Commission européenne ?


Selon le Wall Street Journal, la Commissaire européenne pour la concurrence, Neelie Kroes, serait prête à accentuer la pression sur Microsoft afin que les navigateurs concurrents d'Internet Explorer puissent plus aisément toucher les utilisateurs de Windows. La mesure pourrait consister à obliger à ce que tout nouvel ordinateur personnel vendu avec windows, soit non seulement équipé d'Internet Explorer, mais également des autres navigateurs (Firefox, Opéra, Chrome, etc.). Pour mémoire, selon des données d'avril 2009, Internet Explorer représenterait 48% du marché, Firefox 39%, le reste des parts de marché étant réparties entre Safari, Opéra et Chrome. Cela peut-il constituer une menace stratégique pour Microsoft ? Rien n'est moins sur, dans la mesure où sa stratégie paraît de moins en moins tournée vers le "software", et de plus en plus vers le contenu et la publicité...

La conformité (ou compliance), l'arme défensive des good guys ?



Un certain nombre d'avocats américains, qui occupaient précédemment des postes au sein de l'administration Bush, ont exprimé qu'il fallait s'attendre à voir les contrôles de conformité réglementaire, notamment dans les secteurs bancaires et financiers, être accentués sous l'administration Obama. Ils estiment que le contexte actuel surpasse même celui de la période post-Enron, pourtant très marquée par une politique de contrôles et de poursuites judiciaires. L'expression qu'ils utilisent est totalement évocatrice : "It is 2002 on steroids". Ils conseillent donc aux entreprises de mettre en place des programmes de compliance - ou de renforcer de tels programmes - car ils permettent aux entreprises placées sous les feux des autorités de régulation ou des juges, de montrer leur bonne volonté à coopérer sur le chemin de la conformité. Ce débat m'inspire deux remarques. D'une part, l'efficacité des réglementations et des dispositifs de type "coercitif" est fortement mitigée, comme le montre un certain nombre de travaux. D'autre part, et sans vouloir nécessairement créer de lien direct avec mon billet précédent, les programmes de compliance ne peuvent entraîner un peu plus de tolérance de la part des autorités de contrôle et de sanction, qu'à condition qu'ils ne soient pas cosmétiques et de pure façade...

Le droit de la concurrence, un risque stratégique croissant aux Etats-Unis ?


Le gouvernement Obama a récemment déclaré qu'il souhaitait renforcer les contrôles, les poursuites et les sanctions en matière d'abus de position dominante, et tout particulièrement dans le secteur Hightech. Un certain nombre de spécialistes du droit de la concurrence, et notamment notre collègue Randal Picker de l'Université de Chicago, estiment qu'il s'agit là d'un signal que Google doit intégrer au regard de ses intentions stratégiques.

Intel Inside, Competition...too!

La condamnation récente par la Commission européenne d'Intel, pour un montant d'1 milliard d'euros, est arrivée alors que je relisais un article de Yoffie et Kwak, publié en 2001 dans la Harvard Business Review (n°79-6), et intitulé "Playing by the rules: How Intel avoids antitrust litigation". Dans cet article, les auteurs expliquent pourquoi Intel a rencontré beaucoup moins de problème que ses concurrents en matière de droit de la concurrence, grace à la mise en place d'un dispositif de conformité (documentation interne, séminaires de formation, simulations de contrôle par les autorités de la concurrence, etc.). Cette condamnation pour abus de position dominante sur le marché des processeurs x86, s'est matérialisée selon la Commission européenne, par des remises et paiements conditionnels, ainsi que par l'ingérence d'Intel dans les relations entre les fabricants d'ordinateurs et son concurrent AMD.


Intel conteste évidemment cette décision de la Commission. Sans entrer dans la substance du débat, cette décision interroge au regard de ce que Yoffie et Kwak ont pu souligner. Les programmes de conformité en droit de la concurrence développés au sein d'Intel, n'ont-ils servi qu'à une conformité de façade ? Etaient-ils uniquement adaptés au droit antitrust des Etats-Unis, et pas au droit européen ? Ont-ils été stoppés, sans qu'une réelle culture de la conformité n'ait pu s'installer ? Sont-ils effectifs, mais la stratégie d'Intel a justifié des actions risquées au regard du droit de la concurrence ? Autant de questions qui montrent la complexité du thème de la conformité réglementaire et des relations entre les autorités de régulation et les entreprises.

mercredi 10 juin 2009

Culture juridique d'entreprise

Comme vous le savez peut-être, le Centre de Recherche LegalEdhec dédie une partie de ses travaux aux rapports entre le droit et la stratégie d'entreprise. A ce titre, il est nécessaire de déterminer comment les décisions juridiques sont prises dans l'entreprise. La littérature en management et en stratégie nous apprend que la corporate culture ou l'organizational culture peuvent être essentielles dans l'acquisition d'avantages concurrentiels. Nous avons donc décidé de lancer une étude sur la "culture juridique d'entreprise", afin d'en savoir plus sur la manière dont la décision juridique se prend dans l'entreprise, à partir de quels déterminants, et avec quel effet sur sa performance. Cette étude est réalisée en partenariat avec l'Association Française des Juristes d'Entreprise (AFJE) (voir http://www.afje.org/) , et avec Connie Bagley (Yale School of Management) et Robert Bird (University of Connecticut). L'enquête réalisée auprès des membres de l'AFJE sera donc en même temps menée auprès des membres de l'ACC (Association of Corporation Counsels) aux Etats-Unis.

Une autre étude a été lancée. Elle est plus spécifiquement dédiée à la perception du droit (et de son impact sur les projets et les activités des entreprises) par les dirigeants. Menée en partenariat avec le Business & Legal Forum et l'Association des Edhec, cette étude (et ses résultats) seront présentés à l'occasion du Business & Legal Forum, qui se tiendra à Paris en octobre 2009.