mercredi 18 juillet 2007

Rencontres à Montréal : avocats et professeurs


Mon séjour à Montréal a été riche en rencontres. J'ai d'abord eu le plaisir de rencontrer longuement Maître Jacques Lemieux, avocat associé au sein du cabinet Desjardins Ducharme, cabinet implanté à Montréal et à Québec, et multidisciplinaire en droit des affaires. Maître Lemieux est spécialisé dans la mise en place d'alliances stratégiques et en fusion-acquisitions. De son point de vue, la gestion des risques par le Droit, peut être conçue comme étant la recherche du juste équilibre entre la solution optimale et la meilleure solution. Indépendamment du secteur d'activité des entreprises, certaines sont plus proactives que d'autres en matière de risque juridique. C'est en tout cas ce que son expérience lui permet d'observer. Il me développe un cas sur lequel il travaille, celui d'une entreprise installant une usine en Inde, et qui doit prioritairement veiller à la sécurité juridique de cette implantation (titre de propriété, mesures de protection). Il y a selon lui des éléments immuables en terme d'actifs et d'investissements.
Nous abordons ensuite la question des droits de propriété intellectuelle. Dès lors que les ressources intangibles constituent sans contestation aucune les sources premières des avantages concurrentiels, la capacité de l'entreprise à gérer les risques liés à sa capacité d'innovation est fondamentale. Maître Lemieux insiste sur le fait que, par exemple, il ne sert à rien de bénéficier d'un portefeuille de brevets si on a pas la capacité à le surveiller, à l'exploiter, à le développer.

De manière plus générale, le risque juridique est selon lui une véritable question de culture d'entreprise. La typologie à laquelle il a recours est extrêmement intéressante. Pour lui, il existe 4 segments d'entreprises : celles qui valorisent le rôle du droit et l'intervention du juriste; celles qui reconnaissent leur importance mais les perçoivent comme un "mal nécessaire"; celles qui n'ignorent pas l'importance du droit dans certains cas, mais l'intègrent par obligation; et enfin celles qui ne reconnaissant par son importance, et considèrent sa prise en compte (et le recours aux juristes) comme étant trop coûteuse. Il note que pour les dirigeants et les managers, la prise en compte du paramètre juridique est souvent fonction de l'expérience de chacun, y compris dans sa vie familiale. Cet élément psychologique peut avoir pour effet qu'ils ne voient pas la valeur ajoutée possible du juriste, mais tout au contraire le fait que le droit peut être destructeur de valeur.

Sur la question (maintenant traditionnelle) des rôles respectifs du juriste interne à l'entreprise et du juriste externe, Maître Lemieux considère que c'est une question délicate. La collaboration est dans certains cas exemplaire. Dans d'autres, le juriste interne essaie de se préserver le plus grand territoire possible, dans la mesure où un dossier relevant d'un projet important pour l'entreprise peut lui permettre de se mettre en valeur. Maître Lemieux juge aussi capitale la capacité du juriste à revenir, lorsque c'est nécessaire, vers les opérationnels (par exemple la direction des ventes), afin d'instaurer le dialogue nécessaire à la meilleure compréhension de la situation. Bref, le contraire du juriste "empêcheur de tourner en rond".

Sans surprise, Maître Lemieux confirme l'importance, à ses yeux, de la question de la "disclosure" pour les sociétés cotées, même si le Canada ne dispose pas d'un texte aussi contraignant que la Loi "Sox" de son voisin les Etats-Unis. Il insiste sur le fait que le Québec n'a pas la même culture procédurière que les Etats-Unis; la philosopie des litiges n'est pas la même. Certes il existe aussi les dommages punitifs, mais un plafond est fixé par les tribunaux, ce qui évite bon nombre de dérapages. Le Québec a été pionnier en matière de recours collectif, mais les risques de perversion du système liés à des avocats particulièrement agressifs sont mieux jugulés, de par l'existence d'un fonds spécial géré par le gouvernement. Il me "confirme" aussi l'importance, en période de crise pour l'entreprise, de se doter d'un porte-parole, voire de plusieurs selon les situations, qui ne soient pas les avocats de l'entreprise.

La suite demain...

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour,
Dans le cadre du tournage d’un documentaire sur Jacques Mesrine, réalisé par Philippe Roizes et produit par « la petite Reine », nous souhaiterions être en contact avec maître Lemieux. Pourriez vous lui transmettre mes coordonnées.
cordialement

judith.pennetier@gmail.com

Christophe Roquilly a dit…

Bonjour,

Comme je l'ai écrit il y a quelques instants pour un autre commentaire, je suis terriblement confus de ne pas avoir répondu plus tôt ! J'ai en effet eu de gros problèmes avec mon Blog, m'empêchant de pouvoir visualiser les commentaires. J'imagine qu'il est maintenant vraiment trop tard pour vous être utile...