samedi 7 juin 2008

L'action de groupe modifiera t'elle les stratégies juridiques des entreprises ?


L'action de groupe bientôt introduite dans notre système juridique ?!
Le Député Charié a fait adopter par la Commission des affaires économiques, dans le cadre du projet de loi sur la modernisation de l'économie, un amendement relatif à l'action de groupe. Cette dernière aura pour objet "la réparation forfaitaire des préjudices matériels subis par des consommateurs, personnes physiques, soit du fait de la violation par un professionnel de ses obligations contractuelles ou légales relatives à la vente d’un produit ou à la fourniture d’un service ou des règles relatives aux pratiques commerciales, soit du fait de l’exercice d’une pratique anticoncurrentielle telle que définie aux articles L. 420-1 à L. 420-5 du code de commerce et aux articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne". La France s'inscrirait ainsi dans la ligne indiquée par la Commission Européenne par le biais de son "White paper on damages actions for breach of the EC antitrust rules", qui souhaite que les Etats membres de l'UE développent des solutions efficaces et adaptées afin de faciliter le "private enforcement" en matière de pratiques anticoncurrentielles. L'action de groupe prévue par l'amendement Charié pourrait être menée en réaction à l'exercice d'une pratique anticoncurrentielle telle que définie aux articles L. 420-1 à L. 420-5 du code de commerce et aux articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne.


Il reste à s'interroger sur l'efficacité potentielle de cette mesure. Est-elle réellement de nature à affecter les stratégies juridiques des entreprises, et en particulier leur analyse rationnelle (ou censée l'être...) du risque ? Comment ces actions seront-elles financées ? Comment régler la question de l'asymétrie d'information sans procédure de "discovery" ? Comment "motiver" les cabinets d'avocats compétents sans "contingency fees" ?

Danone & Wahaha : a never-ending story ?

J'ai consacré plusieurs billets à cette "formidable" saga strategico-juridique mettant en scène Danone et Wahaha. Alors qu'il est aujourd'hui question pour Danone de se désengager de la filiale commune, j'ai trouvé une analyse fort intéressante sous la plume d'un avocat et d'un juriste de la firme Jones Day, notamment présente à Beijing. Je vous en recommande la lecture.

Le lobbying donne de l'énergie à Red Bull

Comme je l'ai écrit récemment dans un article soumis à une revue internationale de management, la gestion juridique des risques et des opportunités provenant de l'environnement juridique de la firme peut conduire à divers types de décisions. Concernant les opportunités, l'une des décisions possibles consiste à faire naître une nouvelle opportunité au sein de cet environnement juridique. La création d'une opportunité juridique relève bien souvent du lobbying, quelle que soit la forme prise par celui-ci. De nombreux auteurs se sont intéressés à l'influence du lobbying sur la performance de l'entreprise (Bouwen, 2002; Henisz & Zelner, 2003; Holburn & Vanden Bergh, 2004; etc.). La société Red Bull nous montre encore récemment qu'un lobbying efficace peut créer des opportunités nouvelles dans le cadre d'une stratégie de développement international. En effet, depuis le 16 mai, la fameuse boisson énergisante Red Bull (dans sa version "taurine") est autorisée à la vente sur le territoire français, malgré les avis négatifs de l'AFSSA et du CSHPF.

La bonne et juste information du consommateur : une opportunité plus qu'un risque juridique

Dans un contexte où le consommateur a parfois quelque difficulté à s'y retrouver dans la profusion des offres et la complexité des conditions générales de vente ou de service (voire notamment le cas de la téléphonie mobile ou de l'accès à Internet), les sites dits de "comparateur" peuvent jouer un rôle extrêmement positifs. Ce ne sont pas tant les obligations légales de loyauté et de transparence à l'égard du consommateur qui doivent amener les entreprises à "jouer le jeu", mais plus la nécessité pour elles de satisfaire ce consommateur et de le conserver ! En mars 2007, suite à une enquête, la DGCCRF avait rappelé à l'ordre 11 sites comparateurs de prix, ce qui tendait à montrer qu'il y avait encore des efforts à faire sur le terrain de la transparence et de la loyauté, qui peuvent constituer des éléments de différentiation positifs. La FEVAD, dans un communiqué en date du 20 mai 2008, vient de déclarer que le Secrétaire d'Etat, Eric Besson, est favorable à une Charte de déontologie pour les sites comparateurs, plutôt qu'à une nouvelle intervention législative. Espérons que cette Charte aura un effet plus incitatif que la loi elle-même...

La corruption et la fraude, sources de sous-performance


Certaines études parues dans des revues académiques internationales tendent à montrer que les firmes touchées par des comportements de fraudes et de corruptions auront une tendance à sous-performer. La 10ème édition de l’enquête « Corruption or compliance – weighing the costs » menée par le cabinet Ernst & Young montrent que les entreprises, à travers le monde, ont une perception aigüe des réglementations anti-fraude et anti-corruption. Il semble y avoir quelques particularités françaises, notamment sur la fréquence de la confrontation à des comportements de corruption. Mon opinion est que la conformité (ou compliance) à la norme juridique n'est pas toujours stratégiquement justifiée, mais elle est plus qu'indiquée dès lors qu'il y a risque de corruption.